INFLUENZA

2010. L'Apocalypse fut destructrice. Précédée de l'influenza - écho mortel d'un passé pas si lointain - cette grippe meurtrière avait fait des victimes innombrables. Cadavres puants et âmes agonisantes jonchèrent les rues durant des semaines face à des gouvernements incapables de parer la menace.

Puis, petit à petit, les corps putréfiés s'étaient redressés. Nous avions d'abord cru à un miracle, jusqu'à ce que familles et amis nous sautent à la gorge, sanguinaires et avides, et que les survivants rejoignent les morts dans cette armée funèbre tout droit sortie des enfers. Ces pantins, marionnettes de chair, ne s'étaient pas arrêtés à des considérations aussi vaines que celles des liens de parentés et d'amour: amants comme frères nous arrachèrent les entrailles avec autant d'enthousiasme. L'incompréhension, la peur et la panique régnaient maîtresses dans le cœur des hommes, et en à peine un an la civilisation telle que nous la connaissions avait été changée à jamais, bouleversée et secouée jusque dans ses fondations.

PRÉSENT. Huit ans se sont écoulés. J'ai changé, nous avons tous changé, je n'ai désormais d'humain que le visage, mon corps est meurtri, mon âme est sale. Nous avons tous dû commettre le pire pour survivre et j'attends parfois la douce délivrance de la mort pour échapper à la culpabilité qui me ronge. Mais désormais, la mort n'est plus une consolation, puisque même la faucheuse nous refuse notre dernier souffle.